« Rien ne fonctionne normalement en cette rentrée et si nous pouvons nous réjouir d’avoir des volumes de travaux à réaliser, nous ne maîtrisons que très peu les conditions économiques dans lesquelles les entreprises de BTP vont les réaliser et même si elles le pourront… ». Toujours désireuse d’être très concrète dans les réunions de suivi de la commande publique et des mesures de soutien avec l’État déconcentré, pour étayer ses propos la Fédération du BTP du Var a effectué la première semaine de septembre un sondage auprès d’un échantillon représentatif du secteur de 700 entrepreneurs et artisans varois comptant parmi ses adhérents. Les 150 réponses, soit un plus de 20 %, constituent un taux de visibilité suffisant pour une prise en considération crédible et collant à la réalité du terrain. Les tendances dégagées ont ainsi pu alimenter la discussion avec le préfet et les différents interlocuteurs de la vie économique varoise réunis autour de lui.
Rendez-vous avec Valérie Marrone, présidente des Femmes du BTP du Var
Le président de la Fédération, Jean-Jacques Castillon, et Fabien Piersanti, président du Pôle Habitat de la FFB en Paca et dans le Var, ont fait part d’une fin d’année moins dramatique que ce qui était craint, avec des réserves sur 2023. 24 % des chefs d’entreprises ont une perception d’activité en hausse, surtout celles concernées par la rénovation énergétique et le décret tertiaire, 49 % sont stables, 27 % sont en baisse. Le carnet de commandes moyen s’établit à 4,7 mois s’agissant de marchés signés. Si les volumes sont rassurants, côté valeur c’est plus compliqué au regard des critères multiples, au sortir d’un été en mode dégradé qui n’a rien arrangé sur les pénuries d’approvisionnement et les coûts de matériaux. Faisant preuve une fois de plus de résilience, les entreprises se sont adaptées. On ne parle pas encore de rupture mais les menaces existent sur le verre, les tuiles, les briques…, en plus des autres filières déjà impactées. Un observatoire de la conjoncture et des matériaux du BTP est réclamé en haut lieu.

Optimisme mesuré
La FFB plaide à ce propos un soutien de l’État lié aux difficultés d’approvisionnement, justement, notamment en matière de rallongement des délais de remboursement du PGE sans pénalisation. Par ailleurs, il est difficile pour elles de partager les surcoûts sur un marché en cours avec la maîtrise d’ouvrage, puisque seulement 14 % indiquent avoir obtenu des révisions de prix et seulement avec le public. Il est plus aisé de répercuter les hausses, même partielles, sur les nouveaux devis, en dépit de négociations présentées comme âpres. La flambée de l’énergie va en rajouter une couche et non des moindres, sans parler des conditions de réduction de consommation sans alternative crédible.
Les dirigeants restent optimistes à 70 % pour la fin de l’année, mais cela descend fortement, à 41 %, pour 2023. Il n’y a pas de corrélation entre le niveau de commandes et le moral des dirigeants, analyse la Fédération, compte tenu de cette distinction entre volume et valeur. Parmi les inquiétudes, figurent aussi en première ligne les problèmes de main d’œuvre qualifiée pour 100 % des entrepreneurs interrogés. Les difficultés liées au pouvoir d’achat en baisse et aux demandes d’augmentation des salariés pour combler les manques tendent le climat social dans les entreprises. Lesquelles affichent dans le BTP une santé financière entre moyenne et bonne pour la grande majorité, constatant par ailleurs sur la trésorerie une dégradation pour 26 %, une stabilité pour 56 %, une amélioration pour 18 %.
Var : le BTP accuse le(s) coût(s)
Vigilance de rigueur
De tout cela il a été question, mais aussi, une fois encore, du nécessaire soutien des autorités à la construction de logements compte tenu de la demande, de l’urgence à éradiquer les recours abusifs contre les permis de construire, à lutter contre les retraits non justifiés et les demandes à rallonge de pièces complémentaires. Protéger la planète et donner un toit aux personnes qui en ont besoin n’est pas incompatible. Gare aux règles non écrites, dogmatiques et trop zélées, plaide la FBTP 83 qui s’insurge contre les tentations de restrictions du droit à construire par anticipation du zéro artificialisation net (ZAN) projeté à l’horizon 2050 !
Tout ce qui est excessif est-il vraiment insignifiant ? En l’occurrence non… D’où la vigilance des dirigeants du secteur à maintenir l’activité, l’emploi, et en corollaire l’attractivité des territoires auxquels ils sont tout autant attachés que les autres habitants. Le pilotage à vue n’empêche pas l’ambition durable.