C’est un discours de la méthode et de l’action qu’a livré ce 4 octobre, à l’hôtel de ville, Nicolas Isnard, le maire de Salon-de-Provence, sur les "mesures d’urgence" rendues nécessaires par la hausse des coûts de l’électricité, du fioul et du gaz pour le budget de la commune.
« C’est simple : en année normale, les dépenses énergétiques s’élèvent à 2,2 M€ pour Salon. En 2022, elles devraient se situer entre 5 et 5,5 M€. La hausse atteint +266 % sur l’électricité, +72 % pour l’éclairage public, +91,4 % pour le chauffage urbain et +25 % pour le fioul. Avec les augmentations liées aux frais de personnel et à l’inflation, ce sont au total 4 M€ de dépenses de fonctionnement imprévues pour cette année, puisque la crise a été tellement brutale qu’il était impossible de constituer en amont la moindre réserve ! »
Les maires des Bouches-du-Rhône s'inquiètent face à la hausse du coût des énergies
L’édile s’est donc attaché avec son adjoint aux finances, David Ytier, et ses services à traquer les sources de consommation les plus importantes. L’étude a révélé les points sensibles sur les bâtiments et équipements municipaux… et débouché sur la prise de mesures qui vont se mettre en place dès les prochains jours avec l’espoir d’un impact significatif. « Elles n’ont de sens que si elles s’inscrivent dans le temps », précise le maire.
Les surcoûts mis en lumière
Les activités les plus énergivores en électricité, avec une progression de 125 %, ont été identifiées sur le château de l’Empéri et son musée, le complexe sportif du centre-ville et la restauration collective. Sur le fioul (+112 %), les espaces verts et serres municipales, le garage Payan pour les véhicules municipaux et la halle des sports Saint-Côme (avant sa modernisation, inaugurée le 1er octobre) sont ressortis en tête. Et en chauffage urbain, la piscine des Canourgues, au nord de la ville, a affiché +142 % en un an.
Un « village santé » de premier ordre en voie d’émergence à Salon-de-Provence
Partant du principe qu’il ne fallait pas toucher aux établissements scolaires pour les premières mesures (des détecteurs de présence y seront néanmoins installés), la ville a donc ciblé trois lieux, le Château, les serres et la piscine, et le système d’éclairage public, avec ses 7 450 points lumineux (dont 60 % devraient être moins gourmands en 2023 grâce à l’installation d’ampoules Leds). « Nous allons éteindre les lampadaires de minuit à cinq heures du matin aux entrées de ville, dans les zones résidentielles et sur les monuments, indique Nicolas Isnard. Nous pouvons éteindre distinctement les artères, on se donne un mois d’expérimentation, les zones et heures pourront être évolutives, on ajustera si nécessaire. Sur un an, la mesure peut nous faire gagner 400 000 euros ». Les illuminations de Noël se tiendront seulement jusqu’au 1er janvier, soit trois semaines de moins. Et leur durée quotidienne sera diminuée de moitié (4,5 heures au lieu de 9 heures). Bien évidemment, la patinoire ne sera pas proposée cette année aux Salonais durant les fêtes.

A l’assaut du Château
La piscine des Canourgues passera en mode d’ouverture réduit : le bassin intérieur de 245 m3 restera accessible, mais pas le plus grand (815 m3) à l’extérieur, coûteux en eau et chauffage. « On espère diviser par deux, soit 300 000 euros d’économie, sur une dépense de l’ordre de 600 000 euros. Il faut savoir qu’à fin octobre 2021, le chauffage de la piscine coûtait 8 000 euros. En ce mois d’octobre 2022, c’est 53 000 euros. En un an seulement ! »
Pour le Château de l’Empéri et son musée d’histoire militaire, la fermeture durera huit mois sur douze, des Journées du Patrimoine de septembre aux Journées européennes des Musées en mai. Il est attendu 300 000 euros d’économies. « Durant l’hiver, la fréquentation est trop faible. Je suis persuadé qu’il peut devenir beaucoup plus attractif sur quatre mois si l’on travaille l’offre d’expositions », confie le maire. En janvier, il peut n’y avoir que huit visiteurs en moyenne. La décision gênera donc peu le tourisme. Mais une demi-douzaine d’agents y sera maintenue pour veiller sur les œuvres et la sécurité du site. Enfin, deux des trois serres municipales, les plus chaudes (15° et 20°) seront fermées pour réduire le besoin de fioul.
Matures pour la contrainte
Nicolas Isnard admet que d’autres mesures "de moindre dimension" sont à l’étude, car il est « inenvisageable de demander aux contribuables de payer ces surcoûts. Il faut réduire le train de vie plutôt que d’accroître les impôts ou la dette », souligne-t-il, rappelant qu’il n’est pas question non plus d’en appeler à la Région Paca ou au Département des Bouches-du-Rhône, confrontés aussi à l’explosion des dépenses.
Toulon se donne les moyens d’économiser l’énergie
A ses yeux, les Salonais sont plus mûrs pour de tels choix, particuliers comme entreprises et collectivités étant contraints aux mêmes efforts. « Sur l’éclairage public, les retours d’expérience de Mallemort, Sénas et Aurons sont positifs, au point que la population réclame aux maires d’éteindre plus longuement maintenant ! La crise énergétique a précipité la bascule de nos concitoyens », assure l’élu. Il aimerait qu’elle débouche aussi sur un assouplissement des règlementations pour offrir plus d'adaptabilité et de rapidité aux projets de production, comme les parcs photovoltaïques. « Nous voulons en faire un par mandat. Mais il faut dix ans pour sortir un projet ».
Au-delà du court terme, Nicolas Isnard se dit inquiet pour les retombées futures de cette augmentation des dépenses de fonctionnement sur les capacités d’investissement des communes. Des maires du pays salonais auraient déjà décidé de décaler la mise en route de certains projets tant que la visibilité ne s’éclaircit pas…