Dans la vallée de la Blanche, 22 étudiants en master 1 du domaine d’études Architectures-Ressources et résiliences de l’école nationale supérieure d’architecture de Lyon (Ensal) ont récemment planché sur le devenir de la commune de Montclar dans le cadre d’un workshop (ou atelier collaboratif), organisé par l’Ensal-Lyon et la direction régionale des affaires culturelles Paca (Drac).
L’objectif : imaginer un projet dans les territoires à risques, avec les contrainte d’atteindre le niveau Ademe 2050 en moyenne montagne. « La question principale était de travailler sur la question de la transition en montagne. Quelles sont les ressources ? Quels sont les savoir-faire locaux ? Si le tout ski est fini vers quoi une commune de ce type peut se tourner ? », explique Stéphane Barriquand, enseignant à l'Ensal-Lyon à l’origine du projet.
Diversifier les activités
Des interrogations plus qu’à l’ordre du jour pour la petite commune de 400 âmes, en pleine recherche de solutions de diversification. « La commune/station de Montclar a été créée en 1971 par les habitants et pour les habitants par l’architecte dignois Yves-François Bongarçon. L’installation de remontées mécaniques et la création de la station de ski Saint-Jean Montclar devaient permettre aux agriculteurs d’avoir une nouvelle activité saisonnière permettant de compléter leurs revenus, et puis le ski a connu un véritable engouement. L’équilibre initial a été bouleversé. Mais aujourd’hui, la demande exclusive de ski alpins’essouffle. Nous avons amorcé une diversification des activités en construisant des pumptrack modulaires (un parcours en boucle fermée pour la pratique du VTT ou du BMX), des bains d’extérieur ou en accueillant un mini golf sur la commune, mais nous recherchons toujours une solution pour rétablir un équilibre », explique Béatrice Savornin, la mairesse de la commune. Une stabilité d’autant plus difficile à retrouver pour la petite commune bas alpine que sa configuration spatiale est contrainte par sa topographie montagneuse.

Ce n'est pas une réponse à une commande publique
Les étudiants de l’école nationale supérieure de Lyon ont donc projeté la destruction de l’actuelle mairie, proposé des constructions en limite de territoire ou sur des sites inaccessibles comme le plateau de la chaux. « Nous essayons au mieux d’être à l’écoute des besoins des élus locaux, en terme d’objectifs et de réalité de terrain mais tous les élus qui accueillent un workshop doivent bien avoir à l’esprit qu’en aucun cas nous ne répondrons à une commande publique. Notre but est en premier lieu le travail architectural », démine Stéphane Barriquand.
Et pourtant, si plusieurs étudiants ont livré un travail jugé « utopique » par quelques élus, leur travail a bien attiré l’attention de l’édile de Montclar. « Les huttes mobiles qui pourraient abriter des commerces saisonniers, le projet d’école dans la ferme imaginé par Alexandra Petit ou encore un centre d’art construit sous le télésiège, inventé par Lisa Kolkowski sont des projets qui ne pourraient pas exister à l’identique mais qui ont le mérite de nous donner des idées en les adaptant », assure Béatrice Savornin, qui imagine réaliser un équivalent dans un avenir proche.

Un véritable pôle multimodal
Mais le projet qui a fait mouche, c’est surtout celui d’Adeline Boudenne qui a proposé de créer une gare multimodale en entrée de village : « La commune a besoin de devenir plus responsable en termes de mode de déplacement et c’est là que le bât blesse car aujourd’hui sans voiture on n’arrive pas jusqu’à Montclar et si on y arrive on ne va pas loin dans commune. C’est donc le sujet que j’ai travaillé», explique la jeune fille dans son mémoire. Elle propose, axonométrie à l’appui, de démolir le bâtiment situé à l’entrée du village.
Petites villes de demain : la preuve par l’exemple à Sisteron
Son projet consiste à faire de la route départementale une colonne vertébrale pour irriguer une nouvelle forme de mobilité : « La départementale abritera une ligne de bus régionale régulière. Les intersections systématiques entre la route et les entrées de hameaux deviennent des zones de transition où on laisse son véhicule et où les bus régionaux s’arrêtent. Enfin, les routes internes aux hameaux seront uniquement praticables par les riverains, par les navettes communales et des pistes cyclables y seront déployées ». Outre une réappropriation des accès, Adeline Boudenne imagine la création d’un véritable pôle multimodal : « Nous allons préserver uniquement les murs qui soulignent les directions et réinvestir la pierre issue des murs déconstruits pour édifier un chapelet de muret et de pavés guidant l’usager dans son entrée dans la commune à travers les programmes suivants : un accueil/office de tourisme, une station de bus et un parc de stationnement, un local vélo, un espace de travail et un café, un parc, une halle et un belvédère depuis la chapelle. Pour conclure, ce projet a aussi vocation à démontrer à l’usager que laisser son véhicule, ce qui peut lui apparaitre comme une contrainte, peut se faire facilement et améliorer son quotidien si l’aménagement paysager et urbain l’y aide. »
La maire de la commune, qui imagine un aménagement plus "réaliste" en matière de moyens financiers, s’y voit déjà : « Les projets qui nous ont été proposés sont parfois utopiques mais ils ont eu le mérite de nous secouer. De nous faire sortir de notre zone de confort. C’était particulièrement le cas avec les étudiants Erasmus qui faisaient parti du programme. C’était une vraie belle expérience », souligne t-elle. La synthèse des étudiants, des professeurs et des élus sera rendue d’ici la fin du mois de juillet. Mais déjà la commune de Montclar espère bénéficier d’un nouveau workshop en partenariat avec la commune d'Ubaye Serre-Ponçon sur la thématique "Liens entre montagne et littoral". La commune de Barcelonnette réfléchit quant à elle a en accueillir un dans un futur proche.