La tour K bientôt rayée du paysage. Cette tour résidentielle de 15 étages (9 500 m2 de surface de plancher pour 90 logements) emblème de la cité de la Castellane (1 250 logements propriété d'Erilia, Logirem et Unicil) est aujourd'hui livrée aux mâchoires d'acier des grignoteuses qui ont entamé leur travail de sape début juin. « Le chantier de déconstruction aurait dû démarrer en mars, mais le confinement a tout bloqué. On a attendu le 11 mai pour relancer nos équipes en veillant aux conditions de sécurité renforcées par la crise sanitaire », explique Jacques Monfourny, directeur général adjoint de Ginger Deleo, maître d'oeuvre de cette opération pilotée par l'entreprise sociale pour l'habitat Erilia (Habitat en Région).
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L'immeuble dont il ne reste que le squelette de béton est habillé de grands filets qui protègent le voisinage des chutes de matériaux. Et il est ceinturé par quatre grandes plates-formes qui coulissent le long de rails adossés aux façades pour acheminer compagnons et matériel sur le théâtre des opérations.
Un niveau en moins tous les 10 jours
En trois semaines, le dernier niveau du bâtiment a déjà disparu du décor. « C'était le plus compliqué car il a fallu attaquer la double dalle du toit et roder nos protocoles d'intervention », indique Frédéric Haensler, chef de l'agence Premys Genier Deforge Méditerranée, la filiale de Colas chargée du chantier. Patiemment, les deux mini pelles posées sur le dernier niveau grignotent le béton et son armature. « Tout est calculé au centimètre près pour ne pas provoquer d'effondrement », assure le dirigeant de Premys.
(Crédit : Erilia)
Les gravats sont ensuite évacués au fur et à mesure via une trémie aménagée dans l'ancienne cage d'ascenseur du bâtiment. Après concassage, ils sont ensuite acheminés par camions vers des centres de traitement afin d'être valorisés. Les déchets inertes sont dirigés vers le centre de stockage de la Nerthe, voisin du quartier. Les autres déchets (métaux, plâtres, bois,...) vont dans des centres de traitement adaptés de l'aire métropolitaine marseillaise (à Aix, Martigues et Marseille). « Les 10 500 tonnes de béton seront valorisés à 90 % après avoir été triés et concassés », précise Frédéric Haensler. Une partie de ces matériaux seront d'ailleurs réutilisés sur place pour servir de remblai du futur talus qui sera réalisé sur l'emprise de la tour.
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Ce travail d'érosion devrait se poursuivre jusqu'à la fin de l'année 2020. « On descend au rythme d'une dizaine de jours par étage », explique Jacques Monfourny. « Cette technique du grignotage prend évidemment plus de temps que la destruction par pelle à grand bras mais elle présente l'avantage de préserver les circulations au pied de l'immeuble. » Une donnée cruciale pour cette géante de béton posée à l'entrée du quartier, juste au dessus des voies intérieures et des aires de stationnement. La petite allée qui longe la façade nord de l'immeuble est d'ailleurs protégée pour une longue trémie métallique surmontée de pneus. « Les habitants peuvent continuer à circuler sans entrave, en toute sécurité », avance Frédéric Lavergne, directeur général d'Erilia.
Malgré le trafic de stupéfiants qui perdure, « nous n'avons reçu aucune menace ou pression à l'embauche. Et nous n'avons subi aucun vol de matériel... La concertation préalable a permis de déminer le terrain », se félicite Jacques Monfourny.
En attendant la convention NPNRU
Début 2021, lorsque la tour ne sera plus que poussière, le bailleur et la métropole Aix-Marseille-Provence aménageront un mail piéton provisoire reliant le cœur du quartier et le boulevard Henri Barnier. Dans six mois, tous les acteurs concernés par le projet espèrent disposer d'une feuille de route précise, gravée dans le marbre de la convention du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). Un protocole qui prévoit quelque 210 millions d'euros d'investissement pour la cure de jouvence de la Castellane et de sa voisine de la Bricarde (690 logements gérés par Logirem).
« Il y aura d'autres démolitions », annonce Frédéric Lavergne. Et des reconstructions aussi. Erilia planche par exemple sur la réalisation d'une opération mixte qui agrégera une quarantaine de logements et les nouveaux locaux du centre social du quartier sur l'emprise de l'ancienne station service, le long du boulevard Barnier. Un projet dont les contours restent à définir dans le cadre du dossier NPNRU.
En marge de cette chirurgie lourde, les bailleurs s'attacheront à restructurer l'offre résidentielle. « Le cité compte beaucoup de grands logements qui ne correspondent plus à la demande émergente des familles monoparentales. On transformera les T5 en T2 ou T3 », explique le directeur général d'Erilia. Ce chantier promet d'être moins spectaculaire que celui de la tour K. Mais pas moins complexe...
Repères
Coût des travaux : 3,24 M€ TTC
Coût global de l'opération (y compris honoraires, accompagnement MOUS, frais de déménagement, etc) : 5,506 M€ TTC
Subventions :
ANRU : 3,83 M€
Métropole Aix-Marseille-Provence : 300 000 euros
Fonds propres Erilia : 1,376 M€