Coup dur pour le prolongement de la pénétrante Cannes-Grasse, à quelques mois des élections municipales : même si le projet n'avançait pas à toute vitesse (la déclaration d'utilité publique, DUP, remonte à 2014...), la cour administrative d'appel de Marseille lui a donné un sérieux coup de frein en annulant sa DUP. Après une première décision favorable au projet devant le tribunal administratif de Nice en 2017, cette annulation du jugement en appel à la mi-juillet, la troisième manche va se jouer au Conseil d'Etat.
Le maître d'ouvrage - le conseil départemental des Alpes-Maritimes - a en effet décidé de porter le dossier devant la plus haute juridiction administrative en France. « Nous avons réexaminé le projet, pris des garanties. Nous considérons que l'intérêt public et local du projet est indéniable et que le maximum de précautions a été pris pour préserver l'environnement, dans le cadre d'un projet routier. D'où notre décision » explique Charles-Ange Ginésy, le président du conseil départemental.
L'Etat avait prévu de combler des vallons
Envisagé depuis la fin des années cinquante, la pénétrante Cannes-Grasse n'a plus progressé depuis fin 90' et la réalisation des premières sections entre Cannes et Grasse-Sud, hormis des aménagements localisés (doublement de la tranchée couverte des Aspres, création de l'échangeur de Rouquier). L'engorgement de la voirie départementale et communale qui doit absorber les 40 000 véhicules / jour circulant sur la pénétrante est devenu quotidien aux heures de pointe.
Imaginé à l'origine par l'Etat sous la forme d'un barreau autoroutier (une 2x2 voies avec comblement de vallons pour faire passer l'infrastructure !), le projet, qui représente moins de 2 kilomètres entre les stades Perdigon, où débouche la pénétrante au sud et le stade Jean Girard, quartier Saint Jacques, à l'ouest, a évolué. Transféré au département, il s'est transformé en boulevard urbain réduit à 2x1 voie sur une partie du tracé avec deux viaducs pour franchir les vallons de Loubonnières et Château Folie. Il est à ce jour le projet d'investissement routier majeur du conseil départemental. Mais la contestation des riverains reste forte et la cour d'appel a sanctionné le manque d'impartialité du commissaire enquêteur, le coût et les atteintes portées à l'environnement jugés excessifs...
Le foncier maîtrisé à 80%
« Le problème est qu'il n'y a pas de solutions alternatives et si elles existent elles coûteront le double. Cette décision est contraire à l'aménagement du territoire » s'insurge Jérôme Viaud, le maire de Grasse. « Qu'allons-nous faire à présent ? Les emprises ont été réservées, le foncier acquis à 80%. Ce projet doit être défendu. Il prévoit de plus des dessertes interquartiers. Il pourrait aussi être dédié à du transport collectif » ajoute Jean-Raymond Vinciguerra, conseiller départemental qui défend depuis des années ce projet.
L'annulation de la DUP complique également le projet de raccordement entre la pénétrante et l'échangeur de la Paoute, prévu pour soulager l'échangeur des Quatre Chemins. Ces projets routiers dans le bassin grassois n'en sont pas à leurs premières difficultés. Il y a quelques années la découverte de deux espèces de tulipes protégées (la tulipa lortetii et la tulipa clusiana) sur leur tracé avaient retardé de plusieurs années l'étude de ces opérations et nécessité la mise au point de mesures compensatoires.