Le chantier de doublement du tunnel de Tende, attendu depuis des décennies pour remplacer et mettre aux normes le plus vieux tunnel routier d'Europe actuellement en fonctionnement, est complètement à l'arrêt et on ne sait, à ce jour, dans quelles conditions les travaux pourront reprendre. A la suite de la mise à jour d'un trafic de métaux sur le chantier (deux cents tonnes d'acier auraient été dérobés) et de la nécessité de vérifier la conformité des ouvrages déjà réalisés, la justice italienne a ordonné fin mai l'arrêt du chantier, pendant cinq mois.
La justice française a également été saisie de l'affaire et a mené des investigations sur les travaux réalisés côté français et notamment l'aménagement de la route d'accès. A la suite, le préfet des Alpes-Maritimes a diligenté des experts sur le site et a été mis en lumière par ces experts « l'existence d'une fissuration grave, entraînant l'instabilité du mur de soutènement d'un ouvrage à proximité du tunnel ». Le conseil départemental des Alpes-Maritimes, cofinanceur du projet, a accepté de prendre en charge, en urgence, les travaux de sécurisation.
Pas d'entreprises françaises sur le chantier
Conséquence : en plus de l'arrêt du chantier, la route départementale du tunnel a été fermée pendant trois jours, du lundi 19 juin au jeudi 22 juin, six heures pour permettre la pose de quelque 80 blocs de protection et de 200 m3 de remblais. « Dès le 7 novembre 2016, j'avais alerté le secrétaire d'Etat en charge des transports de l'époque, Alain Vidalies, des doutes que le conseil départemental nourrissait à l'égard des techniques mises en œuvre pour ce chantier. Suite à demande, un suivi technique de ces travaux a été réalisé par le Cerema* et a malheureusement confirmé ces interrogations. Compte tenu de l'urgence et des besoins de la population des Alpes-Maritimes, j'ai accepté, à titre exceptionnel, que le département intervienne à frais avancés, bien que ce soit nullement de sa responsabilité », explique le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti.
Réalisé dans le cadre d'un traité franco-italien signé en 2007, le doublement du tunnel de Tende et l'adaptation des accès sont pilotés par l'Anas (la société publique italienne qui gère et construit les réseaux routiers et autoroutiers en Italie), maître d'ouvrage, et les travaux ont été confiés, entre autres, au géant italien du BTP, Grandi Lavori Fincosit. Ils ont démarré à l'été 2014 et actuellement, le nouveau tunnel a été creusé sur près de 1500 m. L'achèvement complet du doublement du tunnel de Tende est prévu à l'horizon 2020.
Ce projet transfrontalier de 209 millions d'euros, financé à 58 % par l'Italie et 42 % pour la France (un tiers Etat, un tiers conseil régional Paca et un tiers conseil départemental des Alpes-Maritimes), a également la particularité de ne faire appel, pour les travaux, à aucune entreprise française… Il est aussi fortement critiqué par les associations écologistes de la vallée qui craignent une hausse importante du trafic des poids lourds et une asphyxie des villages traversés avec la hausse du trafic routier.
* Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement.