TPBM : En plus d’un demi-siècle, les missions de la SCP ont-elles évolué ?
Pierre Vitel : A la fin des années 50, la priorité était de répondre à la pénurie d’eau qui frappait la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Enfant, je me souviens qu’il fallait remplir des seaux l’été pour faire face à la sécheresse. Cette préoccupation est largement derrière nous puisque désormais, plus de deux millions d’habitants de la région sont desservis par le réseau hydraulique de la SCP. La société assure également une mission d’aménagement du territoire en étant au service de l’agriculture : 40% des exploitations de Paca sont irriguées grâce à la SCP.
Depuis quelques années, nous devons affronter de nouveaux défis. Je pense en premier lieu au réchauffement climatique qui nous oblige à diversifier nos compétences en matière d’irrigation. Des secteurs comme la viticulture, l’oléiculture, l’arboriculture… qui étaient jusqu’à présent peu exposés au manque d’eau auront demain besoin de nouveaux services. Cette évolution ouvre un énorme chantier. Fini le temps où l’on se contentait de noyer les champs… Désormais, on est dans le goutte-à-goutte. Il faut optimiser la ressource. Nous devrons continuer à amener l’eau jusqu’aux exploitations, mais en proposant des systèmes de gestion plus économes de la ressource. C’est une démarche globale qui intègre à la fois l’ingénierie et les nouvelles technologies issues de la révolution numérique. Pour la mettre en œuvre, nous pouvons nous appuyer sur l’expertise de nos équipes d’ingénieurs et de techniciens qui représentent près de la moitié de nos effectifs [la SCP emploie 480 salariés, NDLR].
Parmi les autres chantiers engagés, il y a l’exploitation du gisement hydroélectrique du réseau. Où en êtes-vous ?
La société est engagée dans deux projets innovants dans le secteur des énergies renouvelables. L’ambition est de développer une maîtrise d’ouvrage publique de la production hydroélectrique en proposant le savoir-faire maison à d’autres opérateurs. En 2013, nous avons posé un premier jalon de cette nouvelle stratégie en nouant un partenariat inédit avec une association syndicale d’irrigants, l’ASCO* des Arrosants de la Crau, pour développer un projet de microcentrale électrique. Nous avons créé un groupement d’intérêt économique (GIE) qui va prendre en charge la réalisation et l’exploitation d’une microcentrale en aval du partiteur d’Eyguières, sur la branche arlésienne du canal de Craponne. Grâce à l’exploitation de l’important débit d’eau, on pourra produire de l’électricité qui sera ensuite revendue à EDF. L’ASCO cherchait un partenaire à même de l’épauler non seulement dans le montage de l’opération, mais surtout dans son financement. La création de cette unité de 1,5 MW nécessite en effet un investissement d’environ 3 millions d’euros. Une somme que l’association était incapable d’apporter seule. Avec la formule totalement inédite du GIE, nous allons pouvoir financer, construire et exploiter en commun la microcentrale.
Nous poursuivons par ailleurs notre collaboration avec le CEA** sur le projet « Canalsol », un dispositif de production d’énergie solaire installé directement au-dessus de l’eau du canal. Depuis l’automne 2014, un prototype composé de 132 panneaux photovoltaïques produit de l’électricité à Rians. L’expérimentation vise à déterminer si le refroidissement des panneaux améliore leur rendement. En cas de succès, ce serait une petite révolution dans le monde rural : avec ce type d’équipement, il serait inutile de consommer du foncier agricole pour déployer des centrales solaires, les gestionnaires de canaux mettant à disposition leur foncier.
* Association syndicale constituée d’office.
** Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies renouvelables
La suite de cette interview est à lire dans le numéro 1126 de TPBM (parution le 20/04/2016). Cliquez ici pour plus de renseignements sur nos offres d'abonnement (à partir de 20€/an).