AccueilEconomieDenis Philippe : « En Paca, l'économie sociale et solidaire n'a pas été oubliée »
Interview

Denis Philippe : « En Paca, l'économie sociale et solidaire n'a pas été oubliée »

Si les acteurs de l'économie sociale et solidaire sont sous les feux des projecteurs durant cette crise sanitaire, nombre d'entre eux n'en demeurent pas moins en difficulté. La Chambre régionale des entreprises de l'économie sociale et solidaire Provence-Alpes-Côte d'Azur (Cress Paca), membre de la « Task Force » régionale, est mobilisée à leurs côtés, comme l'explique son président Denis Philippe.
Le président de la Cress Paca, Denis Philippe, évoque les répercussions de la crise sanitaire sur les entreprises de l'ESS.
F. Delmonte - Le président de la Cress Paca, Denis Philippe, évoque les répercussions de la crise sanitaire sur les entreprises de l'ESS.

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TPBM : De quelle manière la Chambre régionale des entreprises de l'économie sociale et solidaire Provence-Alpes-Côte d'Azur (Cress Paca) est-elle mobilisée depuis le début de cette crise ?
Denis Philippe :
D'abord, je tiens à souligner que de nombreux acteurs de l'économie sociale et solidaire sont aujourd'hui en première ligne, à commencer par la Croix-Rouge, mais aussi les Ehpad, le secteur de l'aide à domicile ou encore les cliniques mutualistes. Nous avons donc rapidement tissé un lien très fort avec l'Etat. Nous faisons remonter via une cellule de crise gérée au niveau du ministère de la Transition écologique et solidaire par le haut-commissaire à l'ESS, Christophe Itier, les besoins de nos entreprises mais également les moyens dont elles disposent pour faire face à cette crise.
Nous avons également une relation très forte avec la Région qui s'est rapprochée de nous afin de nous intégrer à sa « Task Force », à côté des autres acteurs économiques. Lundi 30 mars, nous avons ainsi participé à une réunion qui était co-pilotée par le préfet de région et le président de région. Nous avons eu des informations sur ce que l'Etat et la Région avaient mis en place, et ça nous a permis de les faire redescendre à nos entreprises.
Et puis chaque vendredi, nous faisons un point avec la Région sur les besoins de nos entreprises. On voit qu'en Provence-Alpes-Côte d'Azur, l'ESS n'a pas été oubliée. Et je tiens à en remercier la Région car c'est vraiment une démarche qui est venue d'elle. Elle nous a aussi intégrés à la cellule de crise qu'elle a mise en place concernant le manque de masques, ce qui m'a permis de faire remonter nos besoins spécifiques.

Sur le plan interne, quelles initiatives avez-vous prises ?
La Cress a mis un numéro d'appel, le 06 34 32 48 13, qui fonctionne du lundi au vendredi, de 9 h à 17 h 30, où les entreprises peuvent nous faire part de leurs besoins, mais également de ce qu'elles peuvent proposer. Cela nous permet d'alimenter les informations que nous communiquons ensuite aux services de l'Etat et de la Région et de mettre nos entreprises en contact entre elles afin qu'elles puissent s'organiser. Certains acteurs sont en effet plus importants que d'autres, économiquement beaucoup plus forts, et ils peuvent venir en aide ou apporter des services à de plus petites structures.

L'économie sociale et solidaire est très sollicitée durant cette période de confinement. Du coup, est-elle aussi touchée que les autres secteurs par la crise économique ?
Nous ne faisons pas exception. L'ESS aussi tourne au ralenti, on ne travaille pas à la vitesse voulue. Des secteurs sont plus touchés que d'autres. En premier lieu, la formation : on peut dire qu'on va mettre en place des formations par visio-conférence, mais il faut le temps de la faire et tous les organismes n'étaient pas forcément prêts. Le tourisme social rencontre également des difficultés, avec de nombreux centres de vacances qui ont été réquisitionnés pour y loger des SDF ou des personnes qui étaient dans des situations précaires de logement.
Nous avons des craintes pour les secteurs tributaires de la puissance publique pour leur financement. Comme les élections municipales ne sont pas finies, comment cela va-t-il se passer ? Est-ce que les municipalités, qui continuent à gérer jusqu'à la tenue du deuxième tour, vont engager des frais ? Nous demandons aux pouvoirs publics que les municipalités ne reportent pas à la prochaine mandature les moyens qu'elles pourraient mettre maintenant à la disposition des structures, notamment pour l'aide à domicile où les collectivités locales, les communes abondent au financement. S'il y a des retards dans ces financements, ça peut fragiliser encore davantage ces associations.

Justement, les associations ont souvent peu de trésorerie, ce qui peut poser problème pour réussir à surnager actuellement…
Bien sûr, c'est pourquoi nous avons souhaité que les dispositions mises en place pour les TPE et les PME, soient applicables aux associations. A un moment, il y avait un blocage puisque l'Etat avait mis en place des règles qui disaient qu'il fallait avoir 25 % d'autofinancement. Mais dans le cadre d'une négociation, les organisations représentatives de l'ESS au plan national ont obtenu que soit levée cette obligation le temps de la crise. Si bien qu'aujourd'hui, tous les dispositifs qui s'adressent à l'ensemble des entreprises sur le territoire national le sont également à celles de l'ESS : c'est une avancée. Et il y a forcément une reconnaissance puisque les acteurs de l'ESS, ce sont des acteurs de la solidarité.

Ces aides donneront-elles au secteur la capacité de rebondir après cette crise ?
Il y aura des soucis forcément, comme pour tous les autres acteurs économiques. Mais quels enseignements, quelles leçons va-t-on tirer de cette crise ? Parce que cette dernière a révélé que le libéralisme à outrance a ses limites. Au nom du profit, on a fait fabriquer nos masques, nos médicaments en Chine, et on voit les difficultés que cela nous a apportées. Il va falloir relocaliser. La solidarité a un sens, alors il ne faut pas faire appel à elle seulement quand on est en période de crise, quand on a peur. Nous sommes conscients que pour qu'une entreprise fonctionne, il lui faut des moyens. Mais quand le seul objectif, c'est gagner de l'argent pour gagner de l'argent, on voit bien les limites.
Je crois à une société plus juste et solidaire, et nous, acteurs de l'ESS, nous y concourrons. Et j'espère qu'on reviendra à une économie moins délirante que celle qu'on a connue jusqu'à l'avènement de cette crise. C'est quand même dommage qu'il faille arriver à cela pour se rendre compte que la mondialisation, ce n'était peut-être pas la panacée comme on a essayé de nous le faire croire.

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