Produire l’équivalent de la consommation de gaz de 6 900 foyers chaque année et créer un amendement naturel pour les terres agricoles, c’est l’objectif que s’est fixé la société Energie à Vocation Environnementale (EVE) en projetant de construire dès décembre 2022 un méthaniseur mixte sur la commune de Château-Arnoux-Saint-Auban. L’équipement serait installé dans le périmètre de la plateforme industrielle Arkéma, sur une parcelle de 30 000 m2 entre Métha'rénégeration et le parking d'Arkéma. Il s’agira là du premier équipement privé du genre dans le département des Alpes-de-Haute-Provence.
Pour l’heure, la société n’en est qu’à l’étape du dépôt des dossiers ICPE (installations classées protection de l’environnement) et du permis de construire, qu’elle espère obtenir d’ici juillet 2022, mais elle envisage une mise en service en décembre 2023. Elle sera accompagnée par les cabinets B.Nantois et Beaur pour la maîtrise d'œuvre et par le constructeur allemand Envitec pour la réalisation, qui a déjà monté plus de 800 unités de méthanisation dans le monde. Cet équipement, dont le montant avoisine les 13 M€, viendrait s’ajouter aux 18 unités de méthanisation actuellement en fonctionnement dans la région Paca.
Valoriser jusqu’à 36 000 t de déchets organiques par an
L’unité de Château-Arnoux-Saint-Auban serait capable de produire 430 Nm3/h de biogaz et de traiter et valoriser jusqu’à 36 000 tonnes de déchets organiques chaque année. En moyenne les 160 000 habitants des Alpes-de-Haute-Provence produisent 75 kilos de déchets organiques par an chacun selon l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), soit un total de 12 000 tonnes par an.
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Le méthaniseur territorial mixte traiterait donc l’ensemble des déchets organiques produits par les bas- alpins mais il serait également alimenté à 50 % par des sous-produits agricoles comme des tiges de maïs ou de la paille de lavande, à 30 % par des résidus des entreprises (des écarts de tri de biscotte, de pâte à pizza, des résidus de cantines d'entreprises, des biodéchets de sinistre ou des invendus) et à 10 % par les déchets organiques des collectivités, notamment de la tonte de pelouse ou des boues des stations d’épurations. Le biogaz produit sera revendu à Proviridis et injecté sur le réseau de GRT gaz.
Acceptation par les acteurs du territoire
En s’installant sur ce site, EVE va pouvoir bénéficier de synergies avec la société Arkéma, qui restera propriétaire du foncier. « Nous allons notamment utiliser son pont à bascule et mutualiser les services de sécurité », précise Hélène du Garreau, directrice générale de la société. Si l’entreprise a choisi d’installer son projet dans les Alpes-de-Haute-Provence ce n’est pas seulement pour les services offerts par la plateforme industrielle ou à cause des origines de l’un de ses investisseurs natif de Risoul dans les Hautes-Alpes mais c’est aussi parce que Provence Alpes Agglomération (P2A), et avant elle, la communauté de communes de la Moyenne Durance (CCMD), avait déjà réfléchi à l’installation d’un méthaniseur. « L’installation d’une unité de méthanisation nécessite une véritable acception sociale », souligne Hélène du Garreau. Et pour assurer une plus grande acceptabilité, l’entreprise a ouvert son capital aux agriculteurs, à l’entreprise spécialisée dans le recyclage CMR, aux habitants du territoire et à la communauté d’Agglomération P2A. « En cas de rachat par un grand groupe à l’avenir, ce qui n’est absolument pas prévu pour l’instant, les acteurs du territoire conserveront une minorité de blocage ». En d’autres termes, ils garderont la main sur le projet, une méthode qui permet forcément d’améliorer l’acceptabilité du projet.
CO2 valorisé par les cimentiers
Si les agriculteurs jouent un rôle prédominant dans le succès du projet puisqu’il est prévu qu’ils épandent les matières dans leurs champs, pour environ 9 000 tonnes de digestat solide et environ 19 000 tonnes de digestat liquide, les entreprises du BTP de la région Paca pourraient, elles aussi, participer à alimenter ce cercle vertueux. Le CO2 produit par l’activité de méthanisation pourrait être valorisé par les cimentiers. « Nous sommes donc en train d'étudier les besoins des acteurs localement ainsi que les possibilités techniques », explique Hélène du Garreau.
L’entreprise EVE élabore également un projet quasiment identique sur la commune du Pontet dans le Vaucluse.