« Le domaine de la construction génère 40 % des émissions de CO2 des pays développés, représente 37 % de la consommation d'énergie et 40 % des déchets produits », constate l'architecte Claire Valette, installée à Briançon depuis 2020. Consciente du pouvoir des acteurs de la construction pour changer la donne, la dirigeante de Iota Architecture a lancé un mouvement, Carbone K - K pour killer (tuer en anglais) -, réseau coopératif pour une construction éco-responsable dans les Hautes-Alpes.
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« Quand je suis arrivée ici, j'ai voulu rassembler des professionnels impliqués dans la frugalité, qui partagent mes valeurs. L'idée, c'est que cette démarche ne soit plus à la marge mais devienne la norme », espère l'architecte. En lançant ce mouvement, elle s'est aperçue qu'elle était loin d'être seule à défendre ces principes vertueux ; d'autres architectes, artisans, entrepreneurs, bureaux d'études, urbanistes, élus, citoyens, auto-constructeurs, associations ont manifesté leur volonté de rejoindre le réseau. « Nous prônons tous un retour aux principes élémentaires du confort, par la conception bioclimatique et le recours aux matériaux géo et biosourcés et aux modes de construction à faible impact sur l'environnement et la santé », résume Claire Valette.
« La sobriété n'est pas plus chère, pas plus compliquée, ni plus risquée »
Démocratiser ces pratiques éco-responsables demeure l'objectif premier. « Il s'agit d'expliquer au grand public et aux élus que la sobriété n'est pas plus chère, pas plus compliquée, ni plus risquée. » Carbone K vise ensuite à favoriser les échanges entre professionnels, à diffuser des informations de manière pluridisciplinaire, à partager des retours d'expériences, à apprendre les uns des autres. « En tant qu'architecte, on gagnerait à davantage collaborer avec les artisans, à ne pas se poser en détenteur de la vérité. » Claire Valette imagine même la création d'un système d'échange local (SEL), qui consiste à échanger des temps de travail entre professionnels, « une sorte d'entraide encadrée ». La collaboration est le dernier objectif, « trouver une manière de travailler ensemble, de grossir, devenir une alternative sérieuse et répondre à plusieurs à des marchés publics ».
Carbone K s'organise autour de plusieurs pôles. Le pôle AMO (assistance à maîtrise d'ouvrage), par exemple, se chargera d'aider les collectivités à programmer leurs travaux. Le pôle expérimentation cible le réemploi des matériaux, « voir comment réutiliser des carrelages pas jolis ou cassés ». La plateforme de réemploi des matériaux du bâtiment de L'Argentière-la-Bessée est d'ailleurs partie prenante du réseau. Le pôle sensibilisation organisera des apéritifs, festivals, conférences, visites de projets, ateliers enfants pour répandre les bonnes pratiques. Le pôle rénovation pertinente a déjà réalisé sa première étude de cas. « Une habitante de La Roche-de-Rame, souhaitant faire rénover son bâti ancien, se perdait dans les devis. Deux architectes et deux artisans ont posé un diagnostic et ont débloqué la situation. A la fin, la personne y voyait plus clair, avait des réponses et un planning », explique Claire Valette.
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L'assemblée constitutive de Carbone K s'est déjà tenue et les statuts devraient être déposés ce mois-ci. Le réseau est dirigé par un conseil d'administration collégial de sept professionnels de la construction et devrait compter, pour commencer, une quarantaine d'adhérents.