Un nouveau bâtiment sort de terre à Arles, et ce n’est pas n’importe lequel ! Que l’on arrive de la Crau, par l’avenue Victor-Hugo ou de Nîmes, la silhouette de béton brut et d’acier s’impose dans cette ville-musée, sur le panorama de vieilles pierres. Haute de 56 mètres, la tour de verre et d’acier est l’emblème d’un immense complexe culturel de 10 hectares : la Fondation Luma. Voulue par la milliardaire MajaHoffmann (qui a donné à la fondation le nom en abrégé de ses deux enfants Lucas et Marina), c’est l’un des plus gros partenariats public-privé. Il est chiffré (pour le moment) à 150 millions d’euros. Ce gros chantier urbain génère une activité saine et bienvenue dans ce bassin d’emploi.
Colportées par les médias du monde entier, les œuvres de l’architecte star Frank Gehry vont donc compter un nouveau phénomène en 2018. C’est cette aventure technique assez exceptionnelle qui se joue en ce moment à Arles, ville méditerranéenne par excellence, où la corrida et la joute verbale font intimement partie du décor et de l’ambiance. Le geste architectural est osé, novateur, ambitieux. On retiendra qu’il totalise cinq procédures d’Atex (Appréciation technique d’expérimentation. Pour chacune d’elles et pour chaque procédé, un comité d’experts est réuni).
Les premiers coups de pioche ont été donnés en 2015. Des bulldozers ont démoli trois des anciennes halles SNCF (reconverties en lieux d’exposition) avant de préparer les fondations du socle. « A priori, le sous-sol calcaire était propice, mais les sondages ont révélé de vides karstiques. Les plus accessibles ont été comblés par du béton, et pour les autres, il a fallu avoir recours aux micropieux », indique Franck D’Haveloose, le directeur du chantier pour Vinci Construction.
10.000 m2 de façade
Sur le radier est venu se poser un socle de 7,5 mètres de haut qui rattrape la différence de niveau avec l’avenue Victor-Hugo. Ce socle donne accès au niveau zéro de la tour par un superbe escalier à double hélice, lequel fait immédiatement penser au château de Chambord.
(Photo : M. Deuff)
Commençons la visite par le niveau - 2. Dans la fraîcheur humide du béton encore brut, on accède à l’immense salle d’exposition de 1.000 mètres carrés (avec une dalle parfaite, sans joint visible !). Quinze poutres IPN* métalliques (18 tonnes) de 25 mètres de portée structurent la base du bâtiment. Sur le côté droit, une immense fenêtre attend son huisserie et de l’autre, un « mur fusible » (qui sera cassé s’il faut faire entrer des œuvres de grande dimension) donne accès au chantier. « La salle sera aux normes muséales internationales** », indique fièrement notre guide. Le noyau central donne accès aux étages : dix au total, soit une moyenne de plus de 5 mètres par niveau. Fait de béton banché, livré par toupies (afin de réduire l’emprise du chantier), ce noyau sert d’ancrage aux parties métalliques et composites (acier-béton) qui vont constituer les quatre autres tours. Sécurité oblige, notre visite se limite pour le moment au niveau 5. C’est assez pour bénéficier d’un panorama inouï (« un point de vue novateur sur Arles », selon notre guide) qu’offriront les terrasses ouvertes au public.
Ici et là, des ancrages lient les coques métalliques au béton. Sur ce noyau de contreventement, la structure métallique à bac collaborant va progressivement venir compléter l’ensemble. Selon Eiffage Métal, 50.000 heures d’études ont été nécessaires pour orchestrer la mise en place des 10.000 m2 de façade. Ainsi, le plancher radiant est coulé en premier afin d’assurer un ajustement des plafonds.
* Poutre en I à profil normal.
** Normes Icom pour International Council of Museums, en français le Comité international des musées, la seule organisation de musées et de professionnels de musées à l’échelon mondial.
La visite guidée est à poursuivre dans le numéro 1138 de TPBM (parution le 13/07/2016). Cliquez ici pour plus de renseignements sur nos offres d'abonnements (à partir de 20€/an).