71 : c'est le nombre de communes de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur menacées d'un constat de carence pour non respect de leurs obligations légales en matière de construction sociale. L'officialisation de ces sanctions interviendra lors du prochain Comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH). Prévu le 2 décembre, il a finalement été reporté au 16.
Légende :
- Vert : les communes ayant atteint leur objectif
- Bleu : les nouvelles communes carencées
- Orange : les communes carencées
- Rouge : les communes voyant leur pénalité financière majorée de plus de 200%
- Noir : les communes voyant leur pénalité financière majorée de 400%.
Ce chiffre marque une légère augmentation par rapport aux 69 communes sanctionnées en 2017, à l'issue du dernier bilan triennal de la loi SRU* (2014-2016). Avec ces 69 mauvais élèves, la région Paca concentrait à l'époque un quart des communes carencées de l'Hexagone (269 communes). En 2016, le déficit de logements sociaux de la région était estimé à plus de 170 000 logements. Conséquence : d'Arles à Menton, seulement 13% des demandes d'HLM sont satisfaites, un ratio très inférieur au taux national (21%) en 2019. Malgré le doublement de la production enregistré depuis une décennie (de 5 000 à 10 000 HLM agréées chaque année en moyenne), les retards restent importants : le rythme de 10 000 logements annuel « ne représente que la moitié de ce qu'il aurait fallu faire pour combler le retard SRU sur la période 2017-2019 », argumente la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Et la situation devrait se durcir encore pour la prochaine période triennale 2020/2022, le besoin annuel de production de logements sociaux pour répondre à la loi SRU s'élevant à 31 200 HLM. Un chiffre hors d'atteinte si on le compare avec les 33 500 logements (toutes catégories confondues) mis en chantier au cours de l'année 2019 (Source : Dreal – Sitadel 2019).
Une production qui progresse... moins vite que le déficit
Le coup de collier donné sur la production de logement social au niveau régional « se traduit de façon très limitée sur les taux SRU des communes déficitaires », observe la Dreal. Et la marche est extrêmement élevée : pour atteindre le taux de 25% SRU en 2025, il faudrait que ces dernières envisagent une croissance de leurs parcs de résidences principales de 3% (soit plus de 3 fois le rythme constaté aujourd'hui qui est de 0,8% par an) avec un ratio de plus de 60% d'HLM. Des niveaux tout bonnement chimériques !
Sur le territoire, les enjeux SRU se concentrent principalement sur les départements littoraux (Alpes-Maritimes, Var et Bouches-du-Rhône) qui comptabilisaient 146 communes soumises à l'obligation de rattrapage en matière de construction sociale pour la période 2017-2019. Dans le Vaucluse, vingt-et-une communes étaient concernées et cinq dans les deux départements alpins. Si la pression légale a contribué à booster la production HLM dans la région, celle-ci passant de 11 920 logements sur la période 2002-2004 à 34 534 sur la période 2017-2019, la Dreal notre le creusement de l'écart entre les objectifs et la réalisation effective. De 95% sur la période 2011-2013, ce taux a chuté à 57% entre 2017 et 2019. Un décalage qui s'explique en partie par le relèvement de l'objectif, passé de quelque 20 000 logements entre 2011 et 2013 à 60 286 sur la dernière période triennale (2017-2019).
Globalement, pour les 69 communes carencées en 2017, la pression légale a porté ses fruits. Leur participation dans la production de logements sociaux a progressé : les 43 communes doublement carencées qui jusque-là ne pesaient que 8 ou 9 % de la production de logements sociaux sont passées à 15 % ; et les 26 communes nouvellement carencées en 2017 ont vu leur participation augmenter de 6 % à 9 % de la production de logements sociaux.
143 communes soumises à l'obligation de rattrapage SRU
Au 1er janvier 2020, 194 communes de Paca sont concernées par la loi SRU. Parmi celles-ci 13 communes ont atteint le taux légal de 25 % de logements sociaux quand 9 étaient exemptées de leurs obligations légales au titre de l'inconstructibilité de plus de la moitié de leur territoire urbanisé (Saint-Victoret, Tarascon, Graveson, Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône, Bédarrides, Jonquières et Sarrians dans le Vaucluse), et deux car disposant d'une mauvaise desserte en transport en commun (Lorgues et Salernes dans le Var).
In fine, 172 communes étaient donc concernées par une obligation de rattrapage sur trois ans et ont fait l'objet du bilan SRU en 2020. Pour 2017-2019, l'Etat avait fixé deux objectifs à ces retardataires : un objectif quantitatif de réalisation de 60 286 logements locatif sociaux avec un objectif qualitatif d'au moins 30% de PLAI (Prêt locatif aidé d'intégration - les logements les plus sociaux). Fin 2019, le bilan est en clair obscur : si la production atteint des records avec 34 434 HLM sur la période 2017-2019 (dont 26% de PLAI), le taux de réalisation n'est lui que de 57%. Parmi ces communes, 29 ont atteint leurs objectifs (voir carte ci-dessous).
Sur les 143 communes restantes, 71 sont proposées à la carence par les préfets des départements. Parmi ces mauvais élèves, huit vont voir leur pénalité financière majorée de plus de 200%, les représentants de l'Etat jugeant qu'elles ont fait preuve d'une inertie manifeste (voir carte).
Enfin, trois communes sont mises au piquet pour n'avoir produit aucune HLM. Un immobilisme qui leur vaudra de voir leur prélèvement majoré de 400% (voir carte).
Toulon carencée pour la première fois
Ce tableau noir s'étoffe cette année d'une grande ville passée jusqu'à présent entre les gouttes de la carence SRU : Toulon. La capitale varoise affiche un taux d'atteinte des objectifs quantitatifs « relativement bas » (20,5%) avec l'agrément en 2019 de seulement 7 logements sociaux. Le préfet du Var propose donc que la ville d'Hubert Falco soit carencée « afin de sanctionner cette baisse de production importante ».
Les autres grandes villes de la région sont - plus ou moins - dans les clous. La ville de Marseille qui a un taux d'HLM de 21,16% a atteint ses objectifs de production, réalisant 7 866 logements sociaux sur la période 2017-2019 quand son objectif était de 6 100 logements (soit un taux de 128%). Seul bémol, la cité phocéenne est restée en deçà du seuil de 30% de PLAI (24,1%).
Aix-en-Provence (20,15% d'HLM) est également en phase avec le cadre légal, avec un taux de réalisation de 95,7% (1 216 HLM produites sur un objectif de 1 270) et un ratio de PLAI de 28%.
Le cas de Nice (13,37% d'HLM) suscitera plus de commentaires. Alors qu'elle n'a réalisé que 29% de son objectif de production sociale (2 245 HLM réalisées sur un objectif de 7 628), la capitale azuréenne échappe à la carence. L'argument du préfet laisse sceptique : « Si le taux d'atteinte de l'objectif peut sembler mesuré, la posture de la ville est résolument d'investir tous les outils et dispositifs existants pour répondre aux enjeux de production, tant sur le parc privé que public, et ce malgré des oppositions souvent fortes (débat sur la bétonisation de la plaine du Var) », indique le représentant de l'Etat, mettant en avant le rôle de « locomotive de la production de logements sociaux qu'elle a joué au sein de la Métropole Nice-Côte d'Azur ». Une affirmation un brin optimiste si l'on se réfère au bilan provisoire de la production de l'année 2020 au sein de NCA : au 15 novembre, la métropole niçoise n'a obtenu l'agrément que de... 31 logements sociaux. A des années-lumière de l'objectif de 1 721 logements fixé au début d'année (soit un taux de réalisation de 1,8%).
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* Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain.